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Petits écrits de la Main Gauche
Informations aux lecteurs

Samedi 18 novembre 2023 :

PUBLICATION DU TOME 1 DE CAUGHT IN THE MIDDLE LE 18 NOVEMBRE 2023
Pour s'y retrouver avant la lecture : Avant-Propos The Legend Of Zelda

- Caught in the Middle (fanfiction du jeu Zelda Breath of the Wild) =>
T2 achevé ; T3 en cours d'écriture.

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28 février 2015

C'est moi, Julia - Chapitre 3

Le lendemain j’eus un mal fou à me lever. Mon rythme de sommeil des jours passés me donnait l’impression d’avoir une gueule de bois au réveil. La bouche pâteuse et les nausées en moins.

Néanmoins, dès neuf heures je sautais sous la douche. J’avais plein de choses à faire. Je devais m’activer au maximum pour éviter que la mélancolie me gagne à nouveau.

A neuf heures et demie, je consultais mon répondeur, attendant impatiemment l’appel de Morgane Perrière concernant mon rendez-vous médical. Aucun message ne m’attendait, mais il était encore tôt. Cependant, je quêtai cet appel qui me permettrait enfin de voir ma situation avancer, au moins à minima.

Alors je m’occupai, autant que possible. Je briquai la maison de fond en comble, la musique raisonnant dans toutes les pièces pendant que je m’égosillais, éponge à la main. J’avais la sensation de revivre, mais je savais que ce n’était que temporaire. Mon engouement était entièrement rattaché à mon rendez-vous de la veille, à la faible issue que j’apercevais, au loin. Si les choses ne commençaient pas à bouger dans les semaines à venir, je savais que la mélancolie reprendrait le pas sur moi, au risque de me terrasser.

Je profitai donc de cet instant d’accalmie dans mes turpitudes, m’efforçant de respirer la vie, de m’en emplir pleinement à nouveau.

Je terminai mes activités de femme d’intérieur à l’approche des coups de midi. Marie et moi nous étant données rendez-vous pour déjeuner en ville, je me changeai prestement, enfilant un jean plus beau avec un bon vieux polo, avant de m’engouffrer dans ma voiture.

Je me garai donc à proximité de son immeuble professionnel, patientant sagement, adossée au pare-choc de ma voiture. Je m’allumai une cigarette, vice abandonné puis réinvesti après mon accident, observant tranquillement les passants. Femmes et hommes en tailleurs marchaient d’un pas pressé, fendant la foule, tandis que ceux en jean se baladaient innocemment. Le contraste m’amusa un instant.

Dans cette masse d’inconnus, je discernai alors un visage familier, me délestant d’un sourire.

_ Je croyais ne jamais réussir à m’enfuir, fit-elle en m’embrassant.

_ Un problème ? questionnai-je.

_ Toujours le même…

Nous prîmes inconsciemment la direction de notre restaurant habituel, un petit café qui ne payait pas de mine mais dont les plats du jour étaient variables et savoureux.

_ Petit-cerveau ?

_ Petit-cerveau, acquiesça-t-elle. Je te jure, je n’ai jamais autant regretté d’avoir couché avec quelqu’un. Aaaah, les mecs ne sont-ils pas censés être ravis d’un coup d’un soir sans complication ?

_ Que veux-tu, c’est ça que d’être une diva du divan, ils en redemandent, me moquai-je en lui tenant la porte du restaurant.

Elle s’y engouffra en me tirant la langue au passage, m’arrachant un rire devant ses enfantillages. Après une salutation éloignée à la serveuse qui nous connaissait bien maintenant, nous nous installâmes à notre table habituelle, au bord de la baie vitrée.

_ Et bien en ce qui me concerne, reprit-elle le plus sérieusement du monde, c’est décidé. A partir d’aujourd’hui, au premier coup, je ferai l’étoile de mer. Et ce n’est qu’au deuxième que je pompe.

_ Marie !! m’indignai-je en chuchotant. On est dans un lieu public et j’aimerai manger sans avoir ce genre de… commentaires !

Elle se saisit d’un petit gâteau apéritif, me lançant un regard coquin, le sourire au coin des lèvres.

_ Je parlai de sport enfin, je me repose au premier tour de piste, au deuxième je fais des pompes et au troisième… du cheval d’arçon ?

_ Marie !!

_ Tu as vraiment l’esprit très mal placé Julia, il est temps que tu te retrouves une copine…

La serveuse choisit cet instant pour nous interrompre, m’empêchant toute répartie. Nous commandâmes rapidement une carafe d’eau et les plats du jour, tandis que je fusillai Marie des yeux, lui assurant qu’elle ne perdait rien pour attendre. Celle-ci continuait à afficher un sourire flagorneur, que j’avais une envie de folle de lui faire ravaler.

Lorsque la serveuse s’éclipsa prestement, j’eus à peine le temps d’ouvrir la bouche que Marie me devança, me coupant l’herbe sous le pied, comme elle savait si bien le faire.

_ Tu es d’excellente humeur, dis-moi, ton rendez-vous avec l’assistante sociale semble avoir été… concluant…

Au vu de son air goguenard, je devinais immédiatement ce qu’elle sous-entendait, et inutile d’être Einstein pour cela.

_ Il l’a été, oui. Mais pas dans le sens que tu entends…

_ C’est étrange, je discernerais presque une note de regret…

Je remplis nos verres d’eau, lentement. Je fis durer le plaisir de faire subir un silence impatient à Marie pendant quelques instants, vidant doucement mon verre.

_ C’est vrai qu’une conclusion plus stimulante ne m’aurait pas du tout dérangé vu le personnage…

_ Ah ! s’exclama-t-elle, ravie. J’en étais sûre de ça !!

J’entrepris alors de lui conter mon entrevue avec Morgane Perrière. Pendant ce temps, nos assiettes aux odeurs alléchantes arrivèrent, et nous eûmes le temps de les vider intégralement alors que je m’adonnais, pour la énième fois, à une description précise de la beauté corporelle de la jeune femme aux yeux bleus. Et ce à la demande de Marie. J’étais tellement hantée par ce corps parfait mais inaccessible, que je ne remarquais pas le piège se tendre tout doucement autour de moi.

_ Julia, Julia, Julia. fit-elle au moment du café, avec ce sourire que je lui connaissais si bien et qui ne présageait rien de bon. T’es en train de craquer…

_ De craquer ?

_ Sur la jeune et jolie Morgane Perrière…

Je haussai les épaules, mais demeurai tout de même vigilante. Rien n’était jamais terminé avec Marie, tant qu’elle n’avait pas eu le dernier mot.

_ Tu racontes n’importe quoi. Je suis juste reconnaissante, c’est tout.

Elle contempla ses ongles d’un air très sérieux, avec cependant une petite étincelle dans le regard.

_ Et c’est parce que tu es siiiiiii reconnaissante que tu peux la décrire physiquement cinq fois de suite…

_ Tu me l’as demandé !

_ Et sans râler parce-que je te fais répéter encore et encore, continua-t-elle calmement.

_ Mais je…

_ ET, appuya-t-elle en posant ses yeux noirs plein de malice sur moi, en te rappelant un nouveau détail à chaque fois ?

Je la regardai un instant fixement, sans broncher. Cette fille pouvait lire en moi comme dans un livre ouvert, s’en était presque effrayant.

_ Je vais aux toilettes, grognai-je en me levant prestement, signant ainsi ma reddition.

Ce fut au son de son rire clair et vainqueur que je m’en fus vers le fond du restaurant, me jurant de fomenter une vengeance digne de ce nom avec Petit-Cerveau.

Lorsque je rentrai chez moi quelques minutes plus tard, je jetai un nouveau coup d’œil au répondeur, qui n’indiquait toujours pas de message. Je tentai de m’apaiser en pensant que la pause du midi venait tout juste de se terminer, et qu’elle allait bien finir par se manifester.

Rendue à l’inaction la plus totale, je commençai à errer dans la maison, traînant sur internet à la recherche d’une nouvelle profession, m’avachissant devant la télé. Je patientai, encore, et encore.

Rendue à 16h30, je craquais. Elle allait m’entendre parler l’assistante sociale. Je décrochais le téléphone et composai le numéro.

_ Morgane Perrière, assistante sociale ?

Je maudis immédiatement mon idée de l’appeler pour l’incendier, car c’était d’ores et déjà perdu. Sa voix était si calme, si posée, si douce, si chaleureuse, si enveloppante, que je me ramassai aussitôt comme une lavette à ses pieds.

_ Bonjour, c’est Julia Lavoisière.

_ Oh bonjour ! J’allais justement vous appeler. Je n’avais pas eu le temps jusque là, je suis désolée. J’ai pu me renseigner, et j’ai appelé le Médecin conseil pour être sûre du numéro. Le Docteur Lemarchand est prêt à vous recevoir le plus vite possible, vous avez de quoi noter ?

            A peine raccroché que je composai déjà le numéro de médecin. Rendez-vous le lendemain à dix heures.

Les choses avançaient, et la demoiselle s’était amendée de son retard en s’assurant qu’elle me donnait le bon numéro. Je me sentais plus sereine, à nouveau aussi confiante qu’en sortant du bureau où je m’étais entretenue avec elle.

Il n’avait suffi que d’un petit coup de fil, anodin, innocent. Cette femme était une magicienne.

Je repensai alors aux paroles de Marie, dans le restaurant. Je n’étais pas amoureuse, évidemment que non, je ne la connaissais pas. Attirée par contre… Pourquoi pas…

 

****

 

Les semaines s’ensuivirent, toutes plus horribles les unes que les autres.

Lors de ma visite chez le médecin conseil, son avis était qu’il n’avait pas d’éléments médicaux suffisants pour me garder en arrêt plus de deux mois. J’étais paniquée, deux mois pour effectuer une reconversion !

Alors j’avais appelé Morgane Perrière, qui m’avait fixé un rendez-vous en urgence.

Elle n’avait pas été en retard cette fois-ci. Elle avait gentiment placé ce rendez-vous à la fin de sa journée, alors que le bâtiment où elle recevait était déjà fermé. Et cela m’avait fait terriblement chaud au cœur.

La magicienne allait retrouver une solution, j’en étais sûre.

Marie m’avait mise en garde. J’étais trop confiante. Trop enthousiaste à l’idée qu’elle me donne ce rendez-vous le lundi même alors qu’elle n’avait aucune obligation de le faire.

Mais Marie ne connaissait pas combien cette femme était exceptionnelle.

Elle aurait forcément une solution. Mon avenir lui importait, sinon elle n’aurait pas placé ce rendez-vous hors de ses heures de permanences.

Puis dans un bâtiment fermé… où nous serions seules…

Je reconnaissais la tendance qu’avait mon esprit à divaguer lorsque je pensais à elle.  Physiquement, elle correspondait exactement à mes désirs les plus secrets, et elle était la seule personne qui tentait de me sortir de ce bourbier. En soit, cette attirance était normale m’étais-je dit. Sans pour autant qu’une suite soit nécessaire. Ce n’était qu’une forme d’adulation mêlée à une attirance physique. Rien d’autre.

L’important, c’était que j’avais confiance. Elle seule avait une solution.

Lundi, dix-sept heures trente.

La porte s’était ouverte, elle m’avait accueillie avec un pâle sourire. Moi je m’étais avancée, fière et le pas assuré, prête à écouter cette douce voix m’indiquer les démarches nécessaires pour me diriger vers la sortie du tunnel.

Mais elle n’avait pas de solution à me donner. Elle voulait me faire faire un stage de reconversion, un module elle appelait ça. Mais pour cela, je devais être en arrêt pendant au moins trois mois. Elle avait bien tenté de négocier, m’avait-elle dit, mais le Médecin Conseil était resté inflexible. Il stopperait mon arrêt dans deux mois.

Elle n’avait aucune solution. Hormis me diriger vers un bilan de compétence, elle ne pouvait plus m’aider. Mon cas sortait de ses missions, elle ne pouvait plus intervenir.

Elle m’avait alors annoncé avec un petit air désolé qu’elle signalerait ma situation à des collègues de secteur. Puis s’était dirigée vers la porte pour me faire sortir par derrière. J’étais abattue. Effondrée.

Au moment de partir, elle m’avait tendue une main ferme mais légèrement tremblante.

_ Je suis désolée Mademoiselle. Bonne continuation malgré tout.

Lorsqu’elle m’avait serrée la main, le contact de sa peau m’avait fait frissonner, une douce chaleur se répandant le long de ma colonne vertébrale. J’avais planté mes yeux dans les siens, m’y noyant.

Une idée avait alors germé dans mon esprit, une idée complètement folle, que ma vie était foutue et que je n’allais pas la revoir. L’idée que son rôle s’arrêtait ici dans ma vie, qu’elle allait en disparaitre et que j’avais déjà suffisamment de regrets comme ça.

La certitude de n’avoir rien à perdre.

La saisissant par les poignets, je l’avais plaquée contre le mur. Je n’avais pas quitté son regard surpris, m’attendant à une réplique assassine, autoritaire, et un corps qui se débattait. Mais durant les quelques secondes qui avaient suivi, ce ne fut pas le cas. Ne cherchant pas d’avantage, et avant qu’elle ne puisse prononcer une seule parole, je l’avais embrassée.

Ça avait été rapide, ça avait été fugace, ça avait été intense. Pour moi toujours.

Elle ne m’avait pas repoussée. En même temps je ne lui en avais pas laissé le temps avant de m’enfuir en la plantant là.

En gros, c’était le dernier élément important de ma vie.

Après les semaines devinrent mornes, vides.

Dans le pays de Mon Cerveau, la sorcière Mélancolie s’était à nouveau emparée du pouvoir, détrônant la Magicienne pour régner sur mes neurones, sur mon corps, sur mon être, sur mon âme.

La Magicienne avait évincé de façon magistrale la sorcière Mélancolie, mais il ne lui avait fallu qu’une semaine pour succomber aux coups de butoir de la réalité.

Cette courte période avait suffi à ce que ma populace neuronale garda un prestigieux souvenir de son règne, et le regretta amèrement. Mais la sorcière Mélancolie était digne du Führer, et la réalité était son gouvernement de Vichy.

Secrètement, j’espérais que la Magicienne serait mon Général De Gaulle et qu’elle n’attendait que les Américains pour venir me délivrer.

Marie était mon Jean Moulin, mais sans De Gaulle et les alliés, son action n’empêchait pas la mainmise du Führer Mélancolie.

J’attendais impatiemment que le Général fasse son appel du 18 juin. En vain.

Peu à peu, au fil des semaines, les camps de concentration pour les espoirs furent instaurés.

Lorsque la date de ma fin d’arrêt arriva, je songeai sérieusement à la mise en place des camps d’extermination. Mais c’était un secret bien gardé.

Seulement le gaz ne m’attirait pas, c’était plutôt les pilules.

Ce fut le 07 Juin que le Führer Mélancolie décida qu’il était temps que mes pilules SS exterminent mes espoirs déportés.

Adieu.

Julia.

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Commentaires
J
Sniff a plus Julia
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P
Oui. C'est une belle réussite. Sois en fière. ;)
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P
Comment ne pas aimer ta plume.? 💗💝💜💟💓💕💖. Lol j'ai mis tous les cœurs que j'avais sous la main... Hihi. <br /> <br /> <br /> <br /> J'adore tout simplement. J'ai repris l'histoire depuis le début. Et tes touches d'humour placés ici et là me font sourire. J'adore et ne m'en laisserais jamais. Allez j'y retourne. <br /> <br /> <br /> <br /> Gros bisous à toi, pour avoir pris le temps de remanier cette superbe saga.
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