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Petits écrits de la Main Gauche
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Samedi 18 novembre 2023 :

PUBLICATION DU TOME 1 DE CAUGHT IN THE MIDDLE LE 18 NOVEMBRE 2023
Pour s'y retrouver avant la lecture : Avant-Propos The Legend Of Zelda

- Caught in the Middle (fanfiction du jeu Zelda Breath of the Wild) =>
T2 achevé ; T3 en cours d'écriture.

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8 février 2017

Le Noir

 

main-tendue

NB : Article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle
"L'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous."

********************************************************

 

Je suis dans le Noir.

Partout autour de moi, les ténèbres m’entourent, m’enveloppent, m’enchaînent.

Je suis dans le Noir.

Aveugle.

Aucune lumière, aucun son, aucune brise ne vient troubler l’obscurité presque palpable dans laquelle je me noie, dans laquelle j’étouffe.

Sous mes paumes, le sol, dur, froid, râpeux. Désorientée, le souffle court, je tente de me redresser. La surface sur laquelle je repose m’écorche, grignotant ma chair impudemment, je saigne.

Ma respiration s’accélère.

Je suis dans le Noir.

Mes oreilles semblent remplies de coton, mes yeux semblent bandés, mes lèvres sèches, et mon cœur s’affole.

Je suis dans le Noir.

Seule.

Une poigne m’étreint le ventre. J’ai peur. Je pleure.

Autour de moi, le Noir frémit, tremble, se gausse de ma peine, se moque de ma détresse. Les larmes coulent sur mes joues glacées, laissant derrière elles des trainées à vif qui me carbonisent l’épiderme.

Je veux fuir.

Je veux prendre mes jambes à mon cou jusqu’à ce qu’une lueur apparaisse au loin, une lumière chaude, rassurante, pleine de mains tendues, qui m’encouragent, m’appellent, me réclament. M’aiment.

Je hurle.

Et le Noir redouble d’hilarité.

Et seul le silence répond à mon appel.

Ma gorge se noue.

Personne ne viendra à ma rescousse, personne ne viendra me sauver. Peut-être ne le peuvent-ils pas ? Peut-être ignorent-ils ma situation ?

Mais peut-être…

Peut-être que je ne leur manque pas.

Je m’écroule.

Je me couche sur le sol glacial, me roulant en boule, retrouvant cette position de fœtus si primitive mais si rassurante, mais elle ne peut rien contre la douleur qui me poignarde. Mes bras enlacent ma poitrine lacérée, mes jambes se rétractent. Chaque mouvement, chaque sanglot offre une nouvelle parcelle de peau à ce sol incisif qui m’écorche. Mais je n’en ai cure.

Je suis dans le Noir.

Et le Noir m’étreint, me cajole, me berce, me broie de ses insidieuses conclusions, chaque pensée me chahutant dans l’abysse sans fond qui me gobe.

Au travers de mes lamentations, au travers de ma douleur, mon cerveau s’efforce de fonctionner. Je suis dissociée. Mon corps tremble et hurle ma peine, ma tête raisonne et réfléchit.

Ma tête conclut.

Je suis seule. Irrémédiablement seule, et tel est mon fardeau, telle est ma pénitence.

Je suis dans le Noir.

Je suis le Noir.

Le Noir ne ment pas. Le Noir n’offre pas d’espoir, d’illusions. Il est simplement là. Le Noir est tangible et pourtant insaisissable. Le Noir ne promet pas. Le Noir est. Ni plus ni moins.

Le Noir est vrai.

Et le Noir n’abandonne pas.

Je suis le Noir.

Mes pleurs se tarissent. Je n’ai plus de larmes à verser pour ce qui n’est plus, et ce qui ne sera pas. Il n’y a plus que moi.

Et je ne peux compter que sur moi.

J’inspire, j’expire. Je repose mes paumes en sang sur cette matière abrasive. Le dos raide, le regard froid et décidé, je me lève.

Je suis dans le Noir.

Et il ne m’aidera pas.

 Avancer, trouver la sortie. L’Eden est là quelque part. Famille, contes, société et religion le promettent. Tel est mon objectif et personne ne m’aidera à l’atteindre. Avancer.

Un pas, puis l’autre. J’ignore où me diriger. Je n’ai pas de repères, je n’ai pas d’indication. Pas de brise ou de lueur. Le sol est uniformément plat. Le Noir est présent, palpable. Comme irrémédiable.

Mes pas s’enchaînent. Je n’ai ni chaud, ni froid, et pourtant mes bras enlacent mon torse tremblant. J’ai peur. Je sais que j’ai peur mais elle ne peut m’entraver.

J’ai mal. Je sais que j’ai mal mais je ne peux m’y arrêter.

Le temps s’écoule, défile, s’étiole. Je ne peux le mesurer. Il passe, inéluctablement, et je ne manque à personne.

Je secoue la tête, chassant une larme qui s’évade de mes paupières. Ce n’est plus qu’un fait, un simple fait, rien de plus. Ne surtout pas chercher plus.  

Je suis dans Le Noir.

J’erre.

Les heures se suivent et se ressemblent. La faim ne me tiraille pas. La fatigue ne m’assomme pas. Mes besoins biologiques se sont dissipés dans le Noir.

Rien ne peut m’arrêter.

Hormis une chose.

Qui me terrasse.

 

Ce n’est pas un bruit, ce n’est pas un mouvement. Le Noir ne permet pas ce genre d’évènement.

Une sensation. Rien qu’une sensation.

Des poils qui se hérissent dans la nuque, et je me fige.

Mon cœur s’accélère, s’empêtrant dans ses battements qui me tambourinent les tempes, en ratant quelques-uns au passage.

Je suis dans le Noir.

Mais je ne suis plus seule.

Un être humain, juste à côté de moi. Je n’entends pas son souffle, et il ne me parle pas. Mais je sais qu’il est là. Je tends la main devant moi, je cherche, je tâtonne. Mais je ne rencontre rien.

Pourtant je sais qu’il est là.

Un soulagement indicible commence à m’étreindre, un léger sourire retrousse mes lèvres, j’ouvre la bouche prête à l’appeler…

Et je me ravise.

Je suis dans le Noir.

Et le Noir, seul, ne ment pas, ne promet pas. Le Noir est vrai.

Je me détourne.

Je ferme les yeux, même si cela ne change rien. J’inspire, j’expire. Je repars, laissant l’inconnu derrière moi.

Et le temps reprend sa course inexorable, contemplant avec un ennui manifeste mon errance au but inaccessible.

Il n’y a pas d’issu. Il n’y a pas de lumière. Il n’y a, et aura toujours, que moi, et le Noir.

Mais pas tout à fait.

La sensation ne m’a plus quittée. L’être est toujours à côté de moi, il me suit, ombre indiscernable dans l’obscurité. Il n’émet pas un son, ne perturbe pas ma déambulation. Je ne sais rien de lui, ou d’Elle plutôt. Certitude qui accompagne la sensation de sa présence, je sais que l’être est « Elle ». Et au fil des heures qui s’écoulent, cependant, Elle s’insinue en moi, délicatement. Je ne connais pas le son de sa voix, ou les traits de son visage. Mais Elle est là.

Elle est dans le Noir.

Et malgré moi, sa présence me rassure, me cajole. Elle ne m’approche pas mais le simple fait de La savoir là, et je me sens revenir à la vie.

Je sens mes épaules se redresser, s’allégeant d’un poids que je ne leur connaissais pas. Mon pas est plus ferme, plus assuré, et une tension qui m’était inconnue s’évapore de mes traits.

Elle ne me demande rien et pourtant, progressivement, je Lui appartiens.

Et progressivement, la peur m’étreint.

Peur que cette sensation disparaisse. Peur que ma Compagne silencieuse ne soit plus là. Peur que la solitude redevienne une réalité à laquelle je ne peux plus échapper.

L’angoisse me prend. Je ne devais pas La laisser entrer. Je ne voulais plus être blessée, délaissée. Et pourtant, je La sens, là, à côté de moi, en moi. Sans un mot, sans un geste, Elle a grignoté une partie de mon cœur sans que je puisse lui opposer mes barrières. Je Lui appartiens. Et je n’y peux plus rien.

Je panique. Mon souffle s’accélère, je tremble. Je trébuche.

Je tombe.

Une main me retient.

Le temps, inaltérable jusque-là, s’arrête, se fige.

Elle m’a tendu la main, et en un réflexe, je l’ai saisie. Ou plutôt, je m’y suis agrippée. Et Elle ne m’a pas lâchée.

Elle est là, toujours. Et sans le voir, je sens son regard bienveillant sur moi. Je sens la chaleur de sa paume dans la mienne, et mon cœur explose dans ma poitrine.

Je me redresse.

Je tente de retirer ma main, mais Elle me retient. Je ne La vois pas, je ne La distingue pas. Et pourtant, je sais qu’Elle me sourit. Et même si j’ai toujours peur, Elle m’apaise.

Nous restons ainsi, face à face. A plusieurs reprises, ma bouche s’ouvre pour prononcer quelques mots, mais sans trouver ceux qui conviennent. Je n’ose pas La lâcher, pas tout de suite. J’ai si peur qu’Elle parte. Qu’Elle m’abandonne. Comme tous les autres.

Une pression un peu plus ferme sur ma main, et je sais alors. Elle aussi a peur. Elle non plus, ne veut pas me lâcher.

Je lui rends son étreinte, et dès lors la même promesse indissoluble se grave dans nos cœurs.

 

Je suis dans le Noir.

Et le Noir recule.

Une sensation dans ma nuque.

J’ai trouvé ma lumière dans l’obscurité, la main tendue qui m’appelle. Qui m’aime.  

Et aujourd’hui, j’ai enfin compris la véritable signification du mot « Amitié ».

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Commentaires
G
L'amour est comme une pellicule. Il se développe dans le noir...
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