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Petits écrits de la Main Gauche
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Samedi 18 novembre 2023 :

PUBLICATION DU TOME 1 DE CAUGHT IN THE MIDDLE LE 18 NOVEMBRE 2023
Pour s'y retrouver avant la lecture : Avant-Propos The Legend Of Zelda

- Caught in the Middle (fanfiction du jeu Zelda Breath of the Wild) =>
T2 achevé ; T3 en cours d'écriture.

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27 mars 2015

C'est moi, Julia - Chapitre 11

Les heures défilaient et le dessin animé s’était terminé depuis belle lurette. Amélie s’était endormie, la tête posée sur mes genoux. J’avais été surprise de la voir s’installer ainsi, alors qu’elle ne me connaissait que depuis quelques heures, mais la proximité du petit corps m’attendrissait plus que je ne voulais bien l’avouer. Je passai le reste de la soirée à zapper de chaîne en chaîne, l’œil vide.

Morgane frappa discrètement à la porte vers vingt-et-une heures. Je l’avais avertie précédemment de ne pas faire de bruit en arrivant puisqu’Amélie s’était endormie. Lorsqu’elle franchit le seuil, elle semblait exténuée mais contempla sa nièce, recroquevillée sur mon canapé, recouverte d’un plaid, avec une énorme tendresse dans le regard.

_ Alors ? l’interrogeai-je.

_ Elle a redémarré, c’est bon, chuchota-t-elle. Mais je vais bientôt devoir changer la batterie.

_ Tu as mangé ?

_ Non, mais c’est pas grave. Il faut que je rentre.

_ Dis pas de bêtise, elle dort à poing fermé, prends le temps de te poser. J’ai mal dosé le repas de toute façon, il en reste des tonnes.

Elle acquiesça, n’ayant probablement pas la force de résister contre un repas chaud tout prêt. Nous partîmes nous installer dans la cuisine pour ne pas réveiller Amélie.

J’étais aux anges : un an après ma première invitation à quelques mois près, elle restait enfin manger chez moi. Ce constat pouvait sembler pitoyable alors que nous étions sensées être amies. Mais pour moi, cela me semblait énorme.

Tandis que je lui réchauffais son repas, elle m’expliqua ses déboires de la journée, et pendant qu’elle mangeait, je lui parlai de ma soirée avec sa nièce.

Quand son assiette fut vide, je trépignais d’impatience. Des questions me brûlaient les lèvres et j’avais préféré attendre qu’elle soit rassasiée avant de l’interroger. Mais le moment était venu.

_ On a un peu parlé avec Amélie.

_ C’est une petite fille adorable, fit-elle avec un sourire las. De quoi avez-vous parlé ?

_ De là où elle vit.

Je vis immédiatement le regard de ma petite brune s’assombrir et son expression se fermer.

_ Ecoute Julia, on en discutera plus tard si tu veux mais pas ce soir.

_ Oh non, c’est ce soir. Je te connais, sinon tu vas encore éviter le sujet en permanence. Ta nièce m’en a dit à la fois trop et pas assez pour que je supporte de jouer encore une fois au chat et à la souris avec toi.

Elle poussa un profond soupir, repoussant son assiette sur le côté.

_ Très bien. Que t’a-t-elle dit ?

Je fus stupéfaite de sa réaction. Elle ne bataillait pas, ne cherchait pas davantage à esquiver mes questions. Cela ressemblait tellement peu à ses réactions habituelles, que j’eues un moment d’hésitation. Se sentait-elle prête à me parler d’elle ? Ou est-ce par fatigue qu’elle rendait les armes ? S’inclinait-elle pour mieux se fermer par la suite ?

_ Julia, je veux bien te répondre et je suis crevée alors profites-en.

Son ton était si cinglant qu’il me fit encore plus douter. Ses yeux étaient froids, son visage figé. J’avais le douloureux sentiment de la décevoir. Pourquoi, je ne le savais pas. J’hésitais à abandonner mais l’occasion était trop belle pour que je la laisse passer, peu importait les conséquences.

_ Elle m’a dit qu’elle vivait chez toi depuis cet été et que ses parents étaient tous deux décédés. Ta sœur était infirmière et ton beau-frère maçon. Je n’en sais pas plus.

_ Et bien tu sais quasiment tout ce qu’il y a à savoir. Ma sœur et son mari sont morts dans un accident de voiture il y a un an et demi. J’ai obtenu la garde de leur fille, elle vit chez moi depuis l’été dernier. Autre chose ?

La stupéfaction étira brutalement mes traits.

_ Evidemment ! Comment se fait-il que t’en as obtenu la garde ? Ce n’est pas les grands-parents généralement ?

_ Ses grands-parents paternels sont décédés et ma mère est bien trop occupée pour s’encombrer de sa petite fille. Quant à mon frère, il travaille à l’étranger. Et c’était la volonté de ma sœur.

Je demeurai silencieuse. Pendant tout notre dialogue, elle était demeurée froide, cassante. Je ne voulais pas baisser les bras en si bon chemin mais son attitude me désolait.

_ Pourquoi faut-il qu’à chaque fois que je souhaite en savoir davantage sur toi il faut que la conversation tourne au vinaigre ? murmurais-je en me frottant le visage des deux mains.

_ Parce que c’est de ma vie qu’il s’agit et que je n’aime pas m’étaler dessus.

_ Morgane, tu ne peux pas me demander de garder une enfant toute la soirée et faire ensuite comme si elle n’existait pas !

_ Il fallait me le dire si c’était trop te demander.

Je sentais la moutarde me monter au nez. Ses mystères incessants commençaient sérieusement à me taper sur les nerfs, et je ne supportais pas que l’on modifie le sens de mes paroles.

_ Je n’ai jamais dit ça, cette gamine est adorable. Ecoute, je veux bien faire des efforts et y aller en douceur mais il faut que tu m’aides à te comprendre si tu ne veux pas que je mette les pieds dans le plat. Je ne veux surtout pas te blesser, mais comment veux-tu que je fasse si je dois toujours jouer aux devinettes ?

Elle soupira un grand coup et saisit sa tête baissée entre les mains avant de me répondre dans un chuchotement.

_ T’as probablement raison…

Lorsqu’elle redressa la tête, je vis les larmes perler aux coins de ses grands yeux océans. Le cœur brisé de la faire pleurer, je laissais mes envies me guider et me leva pour l’enlacer. Son dos contre moi, je sentis son corps s’agiter en sanglots silencieux, ses pleurs goutant sur mes mains.

Ses sautes d’humeur me déstabilisaient à chaque fois. Tantôt en colère, tantôt en larmes, tantôt détestablement froide et distante, jamais une discussion sur sa vie ne parvenait à être sereine. Je n’arrivais pas à discerner quels démons la dévoraient ainsi, mais à chaque fois je me sentais coupable de lui faire si mal.

Je la laissai pleurer, sans bruit, le visage enfoui dans son cou. C’était si peu face à sa douleur, mais tellement gigantesque face à toutes mes envies retenues ces derniers mois. Enfin la serrer contre moi, même si la situation était loin d’être celle que j’aurais souhaitée.

Elle s’accrochait à mes bras avec désespoir et les larmes ne cessaient de couler. J’ignorais si elle allait finir par se livrer ce soir mais je n’osais pas parler, de peur de la brusquer à nouveau et qu’elle se referme, ou encore de crainte d’empêcher une confession spontanée.

Ses larmes se tarirent quelque peu et je m’assis à ses côtés, en gardant une de ses mains entre les miennes. Comme à chaque fois qu’elle pleurait, elle regardait ailleurs, me cachant son visage avec une sorte de pudeur. Je caressai délicatement sa paume en regardant fixement mes mains. Je n’osais pas lever les yeux sur elle.

Sa voix s’éleva enfin, en un murmure brisé.

_ Ma sœur est décédée le 29 janvier. Lorsqu’il a fallu décider qui aurait la garde d’Amélie, je me suis tout naturellement présentée. Je suis sa marraine après tout. Ma mère s’y est opposée dans un premier temps, mais lorsqu’un testament a été amené par un notaire me confiant la charge d’Amélie, elle s’est retirée, mais pas sans faire de scandale bien sûr.

Stupéfaite de sa confession, je n’osais prononcer un traitre mot. J’étais tellement heureuse et paradoxalement malheureuse de voir que seule sa détresse lui permettait de s’ouvrir à moi. Je me sentais comme une voyeuriste qui regardait les faits et gestes de ses voisins.

_ La procédure a duré près de six mois. Pendant ce temps, Amélie était chez ma mère, elle est venue avec moi une fois le jugement rendu. Depuis, je lui ai consacré tout mon temps. Ma vie se résume à ça aujourd’hui : mon travail et Amélie.

De nouvelles larmes perlèrent sur ses joues. J’avançais la main pour les essuyer quand elle planta soudainement son regard bleu acier dans mon âme, stoppant mon geste. On pouvait y lire une détresse incommensurable.

_ C’est pour ça que nous deux est impossible. Il n’y a pas que nous, il y a Amélie. Ma mère n’a pas accepté que la garde m’en soit confiée, elle me disait trop irresponsable. Si jamais elle apprenait que j’ai une relation avec une femme, elle n’abandonnera pas jusqu’à ce qu’elle me l’enlève. C’est une grande catholique pratiquante, issue d’une bourgeoisie riche et ancienne. Elle ne l’acceptera jamais. Si on vivait vingt ans en arrière, elle me ferait internée.

Sa voix tremblait et les larmes creusaient des sillons humides sur ses joues.

_ Si la garde d’Amélie est contestée, avançai-je timidement, ça ne relève pas de la décision d’un juge ?

_ Si, mais je ne sais pas du tout comment est traitée ce genre de situation par jurisprudence. Je refuse de la perdre.

_ Il n’en est pas question, Morgane. Si c’est la conséquence de ma présence dans ta vie, je m’en retirerais. Jamais je ne t’obligerais à vivre ça.

A ma grande surprise, les larmes reprirent de plus belles. Elle se prit à nouveau la tête entre les mains, la serrant, comme si son cerveau allait exploser. Je ne comprenais pas quel impair j’avais pu commettre.

_ Mais, Morgane, qu’est-ce que j’ai bien pu dire pour…

_ Tu ne comprends pas que le fait que tu partes n’arrangerait pas les choses, m’interrompit-elle. Je ne le supporterais pas tout comme je ne supporterais pas de perdre Amélie. Tout ce qui s’est passé depuis notre rencontre me l’a bien prouvé.

Je restai coite un instant, ne sachant si je devais me réjouir de ses paroles ou au contraire, me montrer aussi désespérée qu’elle.

_ Je ne sais plus quoi faire, gémit-elle. Je me sens… déchirée…

Je l’enlaçai à nouveau et elle répondit à mon étreinte. Elle se serrait fort contre moi, comme pour y puiser du courage, une solution que je ne détenais pas.

Ressentant le besoin de réfléchir à tête reposée, je m’écartais d’elle et lui saisit le menton. Cela lui arracha un faible sourire qui m’attendrit au plus profond de mon être.

_ Je ne partirais pas tant que tu ne me le demanderas pas, Morgane, je te le promets. Je n’ai pas non plus de réponse à t’apporter, mais je te promets qu’on va en trouver une ensemble.

Elle acquiesça silencieusement, s’essuyant les yeux d’un revers de main.

_ Tu es épuisée, repris-je tranquillement. Vu ton état et Amélie qui dort sur le canapé, il est plus sage que vous dormiez ici. Et ce n’est pas négociable.

Son regard brûlant me transperça le cœur. Sans avertissement, elle s’approcha de mes lèvres pour s’en emparer. Je m’écartai vivement d’elle. Je savais que sa détresse la poussait davantage que son véritable désir. Et je ne voulais pas que cela se passe ainsi.

_ Morgane, ce n’est pas raisonnable. Je ne veux pas que tu m’embrasses et que tu me rejettes à nouveau demain matin.

De nouvelles larmes perlèrent au coin de ses yeux. Cela me déchirait le cœur de lui refuser un baiser que je demandai de toute mon âme. Mais je savais que je ne supporterais pas un nouveau retour en arrière.

_ Par contre, fis-je pour adoucir mes propos, je peux te prendre dans mes bras aussi souvent que tu le souhaites.

Elle s’y réfugia de suite sans demander son reste. Nous restâmes ainsi, enlacées, y puisant tout le réconfort que cette simple tendresse pouvait nous apporter. Au cours de cette étreinte, je me saoulais de son odeur, de la force de ses bras et de la douceur de sa peau. J’étais transportée.

Mais tous les meilleurs moments ont une fin, et au bout de plusieurs minutes, je dus me résoudre à y mettre un terme.

_ Hum, Morgane ?

_ Oui ?

_ Si tu veux que j’aille préparer ton lit, il faudrait que tu veuilles bien me laisser partir.

Elle laissa planer un silence, pendant lequel elle ne me lâcha pas. J’attendis patiemment, n’ayant tout de même que moyennement envie de quitter la chaleur de son corps, surtout que j’ignorai quand est-ce que je pourrai à nouveau l’approcher d’aussi près.

_ Tu dors bien avec ton amie Marie, non ? m’interrogea-t-elle.  

_ Heu… Oui, pourquoi ?

_ Alors ne t’embête pas.  

Je m’arrêtai un instant de respirer, n’osant imaginer sa proposition. Il était impensable que mes rêves les plus fous, enfin, les plus fous mais les plus sages surtout, se réalisent de sa propre initiative.

_ Comment ça ?  

_ Nous sommes deux adultes responsables non ? Deux amies qui peuvent dormir ensemble. Pour le reste, tu viens de me prouver que je pouvais avoir une confiance totale en toi.

Je restai à la regarder un instant, éberluée. Cette femme parviendrait toujours à me surprendre.

_ Je suis fatiguée, Julia, me supplia-t-elle. Je veux juste m’enfouir dans des draps et tomber comme une masse.

J’acquiesçai alors, tentant de réfréner le sourire qui me venait automatiquement aux lèvres. Je lui donnai une brosse à dent, une serviette, un pyjama, et nous nous préparâmes sans plus de discussion. Je sentais la fatigue peser sur mes épaules comme Atlas portait le globe. Aussi, ce fut comme un robot que je me dirigeai vers ma chambre, fin prête pour une bonne nuit de sommeil. 

En franchissant la porte, je m’arrêtai soudainement. Je vis Morgane debout à côté du lit, me tournant le dos, déposant des affaires sur la table de nuit. Elle était en simple débardeur et en sous-vêtements, et sa position me donnait une vue imprenable sur ses fesses. Je sentis une chaleur bien connue monter dans mon bas ventre, et des frissons me parcourir de long en large. A ce moment précis, je brûlais de me jeter sur elle, de l’embrasser avec toute ma passion et de lui faire l’amour la nuit durant avec toute cette fièvre d’elle que je contenais depuis plus d’un an maintenant.

Ce désir, il palpitait dans tout mon corps, suintait au travers de mes pores tellement je le refoulais. Et le pire était que j’étais presque certaine qu’elle ne me rejetterait pas. Mais je devais me réfréner, pour ne pas gâcher nos relations à venir.

Tentant de reprendre une certaine contenance, je m’avançai en détournant mon regard. Je déposai mes affaires tranquillement, cherchant prétexte pour ne pas me retourner et je l’entendis se glisser dans les draps. Au moins, là, je pourrais la regarder sans que son corps ne m’appelle.

Je me retournai donc et la vis, pelotonnée dans la couette. Le regard qu’elle me lançait me fit vibrer de haut en bas. Un regard brulant, carnassier, un regard semblable à celui d’un prédateur lorsqu’il guette sa proie, devenu d’un noir d’obsidienne dans la pénombre, me déshabillait de haut en bas, me dépouillait. Jamais au grand jamais quelqu’un ne m’avait regardé comme cela, avec un tel désir si dévorant. Je demeurai là un instant, subjuguée par ces yeux rapaces qui se repaissaient de ma silhouette à moitié dénudée. Ils exacerbaient mon désir, mais leur puissance m’effrayait. En cet instant, elle me faisait presque peur.

Je me résolus d’échapper à son joug en me glissant dans les draps. J’éteignis la lumière et me posa sur le dos, à l’écoute de mon cœur pour que ses battements ralentissent. C’est alors que je sentis sa main venir caresser délicatement ma joue.

Je me retournai pour lui faire face. A la lumière de la lune, son visage semblait paisible. Je m’extasiais devant tant de beauté. Ses yeux brillaient dans le noir. Timidement, j’avançais la main à mon tour, le cœur dérapant, et lui frôla la peau aussi délicatement qu’elle.

Nous restâmes ainsi un moment, nous rassasiant de ce petit instant de tendresse charnel qui apaisait notre désir.

_ Est-ce que je peux m’endormir dans tes bras s’il te plait ?

Sa voix était basse, hésitante. Sans plus de réflexion, je lui ouvris les bras de bon cœur. Elle se réfugia alors tout contre moi, et gauchement nous étudiâmes la position de nos mains pour qu’elles ne frôlent aucune zone interdite.

Lorsque nous trouvâmes notre position, je fermai les yeux pour profiter au maximum du bien-être que cela m’apportait. Je savais déjà que jamais je ne m’en lasserais.

_ Morgane ?

_ Oui ?

_ Maintenant qu’Amélie me connait, j’aimerais passer des moments avec vous. Apprendre à vous connaître toutes les deux, ensemble. Juste une amie qui viendrait parfois boire un café, vous rejoindre au parc… Tu vois ?

Le silence s’installait pendant quelques minutes, permettant à l’inquiétude de se forger une place dans le creux de mon ventre. Je fus heureuse quand elle le brisa enfin.

_ Pourquoi pas…

Mon soulagement fut immense. Pour lui faire sentir ma joie, je la serrais un peu plus contre moi.

_ Je crois même que ça me ferait très plaisir Julia…

Ces doux mots chantaient encore à mes oreilles quand le sommeil m’emporta, serrant contre mon cœur ma petite brune.  

Heureuse, amoureuse,

C’est moi, Julia.

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Commentaires
P
C'est dur de se livrer, hein Morgane.
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